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Pourquoi je n'arrive pas à écrire alors que j'ai du temps? Devenir écrivain.

Photo du rédacteur: Isabelle GauthierIsabelle Gauthier

Dernière mise à jour : 27 oct. 2024

Routine d'écriture inefficace, procrastination: tu as envie d'écrire, tu as du temps, c'est vital pour toi mais tu n'écris pas, peu ou très aléatoirement? La journée passe, tu écriras demain...sais-tu pourquoi tu procrastines?

Je partage ici mon expérience d’autrice-procrastinatrice, ça m'a pris du temps de comprendre et dépasser certains blocages…


ROUTINE, ROUTINE


On parle beaucoup de « routine d’écriture », de planning, de cycle de productivité. Les coach en écriture conseillent de s'organiser, planifier des séances, se fixer des objectifs. C'est utile et nécessaire, mais si ça ne marche pas, la raison au blocage n'est pas une simple question d'organisation. Pendant longtemps, l'idée même de bloquer des plages horaire pour écrire me rebutait. Pourtant, écrire nécessite régularité et discipline…être tranquille, disponible, dans un endroit qui nous inspire, ouvrir la page de la veille et s'y mettre. Maintenant ça se passe à peu près comme ça pour moi aussi, mais pendant longtemps l’idée même de m’assoir et de m’y mettre, tous les jours, est restée une idée.


RECONNAITRE SON DESIR D'ECRIRE


Pourtant le matin, au réveil, j'avais déjà envie d'écrire. Au-delà des bribes de rêves et des mille choses à penser pour la journée, il y avait le désir d’écrire. Mais je n'y répondais pas. Pendant longtemps, je n’ai pas pris ce désir au sérieux, je le mettais de côté. Je l’enfouissais. Je tournais autour en faisant d’autres choses plus urgentes, soi-disant : les courses, sortir le chien, faire du feu... midi arrivait vite, puis le soir tombait. Les jours où je n’avais que cela à faire, écrire, je n’écrivais pas. Les jours où j’avais vraiment autre chose à faire, je ne pensais qu’à écrire et je me disais « ahlala vivement que j’aie du temps pour écrire ».


Oui, moi aussi j’en ris!


Quand les journées prévues pour écrire se transforment en journée de fuite, il y a au bout un sentiment de malaise et de bouillonnement, de frustration. Quand cette belle énergie ne trouve pas de forme d'expression, on se déçoit, on s'en veut. As-tu déjà ressenti ça ? Faire autre chose alors que tu sais très bien que tu devrais écrire. Certains appellent ça la procrastination et il y a plein d’articles sur le sujet.


Je me suis demandé pourquoi je n'écrivais pas alors que j'en avais envie et les moyens. Par paresse? Non, par doute.


LE DOUTE, LA MORT DE L'ACTION


Le doute est une peur déguisée en réflexion plutôt stérile. On perd beaucoup de temps à se poser des questions alors que c'est en faisant qu'on renforce notre conviction d'être sur la bonne voie, et notre confiance en nous-même. Le doute est une agitation mentale qui bloque l'action -à la différence d'une remise en question basée sur l'observation, souvent profitable-. Des questions m'agitaient: et si écrire me prenait tout mon temps ? Et si je n’avais plus le temps de faire autre chose ? Et si ça m’isolait trop ? Est-ce que j’ai vraiment envie de passer tout ce temps seule ? Est-ce que je ne me coupe pas du monde réel ? Toutes ces questions me faisaient douter et tourner en rond.


DIRE OUI A SON DESIR D'ECRIRE


En observant ces blocages, j’ai réalisé que je n’avais pas dit totalement OUI à l’écriture. Il y avait aussi d'autres peurs telles que la légitimité, les compétences, la sécurité "est-ce que je ne ferais pas mieux de trouver un travail salarié ?" Vous me direz, beaucoup de gens écrivent tout en s'occupant de leurs enfants et en ayant un travail prenant. En toute sincérité, j'en suis incapable. Il me faut être seule, avoir beaucoup de temps car je suis assez lente. Mais une fois lancée, je ne m'arrête plus pendant des heures, pas question d'être interrompue par quelqu'un d'autre que moi-même. J'ai écrit les deux premières versions de Pikutipi alors que j'occupais un poste à responsabilité. C'était laborieux parce que je m'y consacrais de temps en temps: quand je n'étais pas trop fatiguée, quand je n'étais pas avec mon copain, quand je culpabilisais d'avoir laissé mon livre si longtemps de côté et qu'écrire me manquait. Un peu comme des phases d'anorexie-boulimie d'écriture. Tout ou rien. C'était mon plus grand désir et je ne lui avais pas donné la priorité.


COMMENT DIRE OUI?


A un moment, j’ai fini par accepter qu'écrire des romans était la seule chose que j’avais vraiment envie de faire dans la vie. Devenir écrivain était dur, parce que je pensais que ce n'était pas acceptable pour mon entourage qui s'inquiétait pour moi. Mais c'était de me voir tourner en rond qui les inquiétait: quand j'ai enfin assumé, ça se voyait que j'avais confiance en mon projet et tout le monde m'a soutenue. Il m'a donc fallu accepter qu’écrire soit ma priorité, plutôt que gagner ma vie de manière régulière avec un salaire chaque mois, ce que j'avais toujours fait auparavant. Est-il acceptable de ne pas chercher la sécurité dans cette société ? Cette question est importante. Dans l'inconscient collectif, vie d'artiste = insécurité, galère. Quand j'ai changé mon regard, cette peur s'est transformée en vie d'artiste = en accord avec moi-même.


LA SECURITE INTERIEURE


Pour devenir écrivain, j'ai fini par quitter mon travail. J'avais enfin tout le temps et un peu d'argent de côté. Pourtant, j'ai encore mis deux ans à écrire la dernière version de Pikutipi. J'ai mis si longtemps parce que j'angoissais malgré tout de ne plus avoir une place professionnelle dans la société. J'ai donc fait comme beaucoup de personnes en reconversion, suivi des formations et monté mon entreprise. Je ne regrette rien, c'étaient des étapes nécessaires pleines d'enseignements. Mais en attendant je ne répondais toujours pas totalement à ma vraie priorité et je me sentais plutôt angoissée par le futur. Mes seuls moments de paix, c'était quand j'écrivais. Alors, épreuve après épreuve, je n’ai pas lâché. Ecrire était comme une base, un socle, à l’intérieur. A présent que je l'ai accepté, c'est un feu qui brûle sans jamais s’éteindre, dont je suis l’unique vestale.  


LA PEUR DE LA SOLITUDE


Je craignais aussi la solitude, l’isolement…qu'écrire me coupe des autres, du monde. En réalité, c'est le contraire. Je crois qu'on ne se sent jamais seul quand on écrit: on ne peut pas s'ennuyer si on croit en ses personnages. Ils vous emmènent loin. Ecrire, ce n’est pas se retirer du monde, pas vraiment. C'est se retirer en soi-même pour donner le meilleur de soi au monde.


CONCILIER ECRITURE ET NECESSITE QUOTIDIENNE


Aujourd'hui, je trouve plus de stabilité que jamais dans l'écriture. J'ai changé ma vision des choses. Quand on me dit que ça ne permet pas de vivre et que très peu d'auteurs s'en sortent, je n'adhère pas à ce scénario, ce n'est pas le mien. Je continue. L'angoisse de manquer d'argent n'est rien comparée à cette sécurité intérieure. J'ai envie de créer des choses pour gagner ma vie avec l'écriture. Si on m'exhorte à trouver un job alimentaire, ça me bloque, et même ça me révolte. Mais je ne me raconte pas d'histoires: je me bouge pour gagner de quoi continuer à avoir du temps pour écrire mon 2ème roman...ça demande beaucoup de créativité, de patience et surtout une immense confiance, de l'ordre de la foi. Le plus important est cette paix que je ressens d'être en accord total avec moi-même. J'étais bien plus angoissée quand j'avais un bon salaire. Quel paradoxe, non?

Et toi, as-tu dit OUI ?


écrire dans la nature

 

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